lundi 19 mars 2012

LE CITRON BLEU N°2 - JUILLET 1929

[Titre : LE CITRON BLEU - Sous-Titre : Revue littéraire mensuelle rédigée par des jeunes, avec la collaboration de grands Écrivains - Dates de publication : Mai 1929 (n°1) à juillet 1929 (n°2) [?] - Périodicité : mensuelle (publication irrégulière) - Lieu de publication : Neuilly - Format : 163 x 250 mm - Couverture : Imprimée en bleu marine sur papier crème - Pagination : entre 40 et 64 pages ; pagination non suivie - Prix et abonnements : Le numéro = 5 francs ; Un an = 50 francs ; Six mois = 30 francs - Directeur-Gérant : André de Nicolai - Collaborateurs [liste non exhaustive] : Henri Baderou, André David, Charles Dédéyan, Solange Duvernon, Armand Godoy, Francis Gray, Fernand Gregh, Jean Lyon, Jacques Molinard, André de Nicolai, Pierre Noël, André de Paulhac, Jean Rameau, René Ramon, René Richou, José Valroc - Adresse : 72, rue Charles-Laffite, Neuilly - Imprimé sur les presses de l'Imprimerie Guillemot et de Lamothe, 18, rue Turgot, Limoges (Même Maison à Paris)]
LE CITRON BLEU
N°2 (Juillet 1929)
[Date de publication : Juillet 1929 - Couverture : Imprimée en bleu marine sur papier crème (Date, Numéro, Titre) - 2e de couverture : muette -  3e de couverture : Imprimeur - 4e de couverture : Prix - Page 1 : Page de titre (Année [Première Année], Numéro, Date, Titre, Sous-Titre, Sommaire) - Page 2 : Titre, Sous-Titre, Directeur, Mentions ("Elle compte parmi ses rédacteurs : Henri Baderou, Francis Gray, Jean Lyon, Jacques Molinard, Pierre Noël, André de Paulhac, René Ramon, René Richou / Et parmi ses collaborateurs : Mmes : Colette, Jane Catulle-Mendès, Lucie Delarue-Mardrus, Solange Duvernon, Rosemonde Gérard, Harlette Gregh, Gérard d'Houville, Amélie Murat, Comtesse de Noailles, Rachilde, Noël Santon ; MM. Paul Bourget, Henri Brémond, Abel Hermant, Pierre de Nolhac, Marcel Prévost, Henri de Régnier, Paul Valéry, de l'Académie française, Pierre Albert-Birot, Maurice Bedel, André Bellessort, René Benjamin, Binet-Valmer, René Bizet, Francis Carco, André Chancerel, Francis de Croisset, André David, Jacques Deval, Auguste Dorchain, Roland Dorgeles, Édouard Dulac, André Dumas, Louis Dumur, Henri Duvernois, René Fauchois, André Fontainas, Paul Fort, Armand Godoy, Fernand Gregh, Edmond Haraucourt, Francis Jammes, Loys Labèque, Léo Larguier, André Lebey, Sébastien-Charles Leconte, Frédéric Lefèvre, Charles Le Goffic, Maurice Maeterlinck, Xavier de Magallon, Maurice Magre, André Marcou, Camille Mauclair, François Mauriac, André Maurois, Fernand Mazade, Francis de Miomandre, Alfred Mortier, Paul Morand, Gabriel Nigond, Jacques Normand, François Porché, Armand Praviel, Ernest Prévost, Jean Rameau, Paul Reboux, André Rivoire, Maurice Rostand, Jean Royère, Edmond Sée, Gaston de Sermoise, Émile Vitta, Miguel Zamacoïs / Elle contient des dessins de A. Calbet, Didier-Pouget, F. Sabatte, A. Sikorska, Van Dongen, Raoul Dufy, Walch Le Tannois, Reg, René Ramon. / Chaque année paraissent douze à quinze numéros luxueusement édités, variant de quarante à cent pages. D'intéressants suppléments complètent la collection : reproductions d'autographes, hommages, numéros de novembre (la guerre), de décembre (Noël), etc...), Abonnement, Adresse, Mention ("Toute la correspondance concernant la Rédaction et l'Administration doit être adressée à André de Nicolai") - Page 64 : Livres reçus, gérant, Imprimeur - Pagination : 64 pages]
Sommaire
Fernand Gregh : Invocation, sonnet (p. 3)
André de Paulhac : Lesquels resteront ?... [Les Matinées du Hêtre Rouge de Frédéric Lefèvre ; La Seconde de Colette ;  La Petite Infante de Castille de Henry de Montherlant ; L'Homme-Vierge de Marcel Prévost ; Le Vice d'une Femme d'André David ; La Poésie de Rachilde de Noël Santon ; Erromango de Pierre Benoît ; Testament d'un Latin de Pierre de Nolhac  ; Armand Godoy] (p. 4-10)

Armand Godoy : En revenant de Saint-Martin..., poème [A Paul Fort] (p. 11)

José Valroc : Profils : Émile Vitta (p. 12-16)

André David : Démonstration, poème (p. 17)

Jacques Molinard : "Entre deux Citronnades" : L'après midi du livre (p. 18-19)
René Richou : Frontispice, poème (p. 20)

Henri Baderou : Le Salon des Artistes Français [illustré de 4 reproductions hors-texte d'oeuvres de W. Didier-Pouget (La Vallée du Doubs, près de Clerval), F. Sabatte (L'Oreiller), A. Calbet (Papotages), Guida (Saint-Sébastien)] (p. 21-30)

*** : Les chercheurs, poème (p. 31)
Solange Duvernon : Sous le train, nouvelle (p. 32-35)

Charles Dédéyan : Une journée de Cicéron à Rome (suite et fin) [chapitres VIII à XV] (p. 36-41)

Jean Rameau : La Reine Voilée, féerie en un acte en vers [suite et fin - à partir de la scène II] (p. 42-63)
Document
"L'après midi du Livre"
Voitures de maître que d'adroits virages alignent dans la cour de l'Hôtel Salomon de ROTHSCHILD ; groupes d'agents ; curieux inévitables. Montée de femmes élégantes et d'hommes connus vers les salons où les auteurs les plus célèbres et les plus aimés du public vendent eux-mêmes leurs œuvres au profit des écrivains combattants. Atmosphère parfumée, pesante. A travers les portes vitrées, lignes de pelouses où s'élèvent en aigrettes des jets d'eau.

Il ne sied pas, - ce n'est pas le jour, - de remarquer aux murs les admirables études signées Delacroix, Arry Scheffer, etc... Tentons plutôt de nous faufiler à travers les comptoirs, en quête d'écrivains connus ou aimés.

Solange DUVERNON, exquise à son habitude, attend près d'une plus de Monsieur Vénus, de La Tour d'Amour, de Madame de Lydone, l'arrivée de RACHILDE, l'incomparable romancière qui animera de sa présence toute mon après-midi, et qui s'annonce par son joli rire moqueur en cascatelle. Ses cheveux blancs tirés sous sa toque grise, la voilette mi-relevée, elle détaille les invités de ses petits yeux fureteurs et ironiques.

Je cherche en vain Mme de NOAILLES, toujours souffrante, et COLETTE aux places qui leur sont réservées mais, rencontre inattendue, voici venir vers moi Margarida LOPES DE ALMEIDA, la charmante artiste brésilienne, sculpteur de talent, les bras chargés de livres de son amie Jane CATULLE-MENDÈS.

C'est une star de cinéma, Sandra MILOWANOFF, qui, heureusement pour lui, aide Georges OUDARD à vendre ses œuvres. Sa grâce et son accent charmant font beaucoup pour le biographe de Law.

Souriantes et audacieuses, de jolies femmes vous arrêtent au passage - les couloirs sont si étroits ! - et vous font les propositions les plus diverses : Pierre MILLE, Claude FARRÈRE, qui trône au fond d'une salle, étalant sa barbe de croquemitaine, Wilfrid LUCAS, Édouard HERRIOT, qui n'a pas le sourire, bien qu'il vienne de vendre un de ses ouvrages à André TARDIEU.

Roland DORGELÈS est très sollicité, grand écrivain et président de l'Association des Écrivains Combattants, auxquels - et c'est la seule raison pour que l'on fasse de telles folies - reviendra le produit de cette vente.

L'Académie Française est représentée par Maurice DONNAY et Marcel PRÉVOST, affables, souriants, avec la désinvolture distinguée de ceux dont la réputation est bien assise.

André DAVID, jeune écrivain remarquablement doué à qui s'intéressa Emilir (sic) BOURGES, fait des affaires dans un coin opposé à celui de RACHILDE qui, - Dieu sait pourquoi, ou le Diable ! - refuse de vendre aujourd'hui avec lui Le Prisonnier, qu'hier ils écrivirent ensemble. Léger froid, d'autant plus que le prochain livre d'André DAVID, Le Vice d'une Femme, ne paraît que dans quelques jours. Mais n'est-il pas consolant pour lui d'avoir pour vendeuse l'adorable petite madame de GOBINEAU ?

Le beau poète Armand GODOY m'institue son premier acheteur avec la reproduction autographe de son admirable Drame de la Passion. Patiemment il attend ses clients, échangeant de temps à autre quelques mots avec ses voisins : André LEBEY et - comme dit François Ribadeau-Dumas - "le gentil CARCO", qui, pour mieux attirer l'attention, s'est adjoint une belle espagnole tout à fait couleur locale.

Paul MORAND n'est pas là, non plus que Jean COCTEAU, - dont on se passe aisément, - ni le poète de La Déserteuse, du Trouble et de Morbidezza, Maurice ROSTAND, ce qui est plus regrettable. Grande vedette, André MAUROIS, qu'il n'est même pas besoin de qualifier, signe en souriant d'innombrables exemplaires de Climats et de Disraëli.

A la fumée s'élevant d'une cigarette, je devine Lucie DELARUE-MARDRUS, enfin arrivée, et déjà prête à repartir, parce que dépourvue d'encre et de porte-plume, et ne sachant pas se servir d'un stylo, instrument que RACHILDE, pourtant si à la page malgré ses soixante-neuf ans, n'apprécie guère non plus. AUREL a la chance de se trouver près d'une porte-fenêtre : elle respire sans difficulté tandis que nous étouffons au milieu de la foule.

Parmi les acheteurs de marque - car il y en a, et qui dépensent sans compter - voici Madame COMBES, possesseur dans les Landes d'une des plus belles propriétés de France, et qui s'attarde auprès de Pierre MILLE, de RACHILDE et de Paul FORT, un peu moins bohème qu'autrefois ; Marie-Thérèse CAHEN, accompagnée de sa fille Jacote, cause avec Marguerite MORENO qui vend, qui vend, qui vend... Armand GODOY, outre le comptoir qu'il tient, achète beaucoup : rien n'égale la bonté de cet homme, que son talent. Maud LOTY, au bout d'un quart d'heure, a dépensé tout son argent, et commence à emprunter.

Un commissaire fend la foule à grand'peine, qui porte vers son auto les nombreux volumes acquis par le Président de la République, dont le sourire ne se dément pas un seul instant, même lorsqu'il se trouve en présence de l'ancien Président du Conseil.

... La hauteur des piles de livres diminue ; l'heure approche, du départ ; fatigués d'avoir prodigué sourires et dédicaces, les écrivains comptent l'argent gagné ; les vendeuses se laissent entraîner vers le buffet, sur les pelouses.

En partant, l'on n'a pas cette impression pénible de vide et de temps perdu si fréquente dans les réunions de tout genre. La journée a été bien pleine, - et bien remplie. Les anciens combattants seront-ils heureux ?

Moi, - je l'ai été.
JACQUES MOLINARD.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire